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¡ Salud y Repùblica!
Satané virus. Il est des jours où le confinement se fait plus lourd. Ainsi de ce lumineux matin. Je sors sur mon balcon. Je salue le soleil, pleine face. J'espère atténuer par ces courtes expositions le teint de courgette que est désormais le mien. En temps normal, un autre soleil me caresserait la joue. Je devrais être à Madrid en ce 14 avril. A la Puerta del Sol, plus précisément. C'était prévu. J'y aurais salué la République, la nôtre comme disait ma mère. La nôtre. La deuxième République d'Espagne, proclamée le 14 avril 1931.
Mon père avait l'habitude d'y faire son petit pélerinage perso, chaque année. Il marchait dans ses propres pas. Le jour de la proclamation, il avait huit ans et il y était, à la Puerta del Sol, avec son père qui lui tenait la main et dont il n'oublia jamais l'émotion. Comme il ne perdit pas une miette de l'allégresse ambiante. Il est quelque part dans la foule, sur la photo figurant à coté de ces lignes. Madrid et toutes les grandes villes d'Espagne, vit le peuple en liesse fêter sa belle victoire, par les urnes, sans un coup de feu, sur la monarchie. La République eut une courte vie, elle fut noyée dans le sang par les cathos-fachos allergiques à la liberté. A ce jour, les crimes du franquisme n'ont toujours pas été jugés. Encore moins punis. Il en reste une plaie ouverte lourde de conséquences sur la vie politique du pays.
Pour ceux qui l'ont connue et qui ont su en transmettre les valeurs aux générations suivantes, la République Espagnole reste un trésor. La Constitution de 1931 un exemple de modernité, d'audace, de foi en l'humain. Le texte en est court, simple, accessible. Mon article préféré? Le six: "La Nation renonce à la guerre et à la violence dans sa politique extérieure". En 1931, dans une ex puissance coloniale, ça donne une idée de l'esprit général du texte, qui prévoyait aussi, entre autres, la séparation de l'Église et de l'État, le vote des femmes, le divorce...
La République laissa un tel souvenir chez ceux qui la vécurent, un tel enthousiasme, une telle qualité d'être, généreuse, sincère, altruiste, qu'elle éclaire encore aujourd'hui la vie de leurs enfants et petits enfants. Notre vie. Je garde l'espoir un jour de pouvoir partager cette richesse avec les Espagnols d'aujourd'hui, privés non seulement d'un pan essentiel de leur histoire, mais aussi, par voie de conséquence, d'une source de fierté et d'altruisme. Aujourd'hui, l'exil espagnol et sa descendance (¡Saludos a todas y todos!), partout en France, va fêter la République en mode confiné, mais ça ne changera rien sur le fond. Le coeur un peu serré, comme toujours, on chantera, on rira, on saluera notre héritage, notre mémoire. Et on pleurera, aussi, peut être, un tout petit peu. Nous, les Républicains, avons payé d'avance, cash, le droit de nous émouvoir. Et quand on est tout seul, pas la peine de dissimuler...
Dans son allocution d'hier soir, à ma surprise tant nous sommes dans le contre emploi, Macron a cité la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, dont s'inspira notre Constitution Espagnole : "Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune". Utilité commune? Genre service public? Sans dec? Choc frontal avec son idéologie des premiers de cordée. Est-il sincère? Je l'espère pour lui. Sinon, instrumentaliser ce que l'être humain a pensé de plus beau serait d'un très vilain opportunisme. A t-il été contagié par nos valeurs, qui survécurent hier aux guerres, aux dictatures, qui résistent aujourd'hui aux ravages du cynisme et de l'égoïsme inhérents à l'idéologie néolibérale? Faisons lui crédit. Aujourd'hui, je me sens prête à toutes les bienveillances.
Hoy soy Republicana y estoy de fiesta.
Demain, retour à la vigilance. Faudra voir à voir à pas se payer notre tête....
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Gregorio Làzaro - Le 14/04/2020 à 18:08
“Era un hermoso día de sol. Con las primeras hojas de los chopos y las últimas flores de los almendros llegaba, al fin, la segunda y gloriosa República Española." Antonio Machado. 14 de abril, día de la República Un abrazo hermana
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Isabelle Alonso - Le 14/04/2020 à 18:28
Un abrazo a vosotros todos (¡respetando el confinamiento!).
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Martin SNOECK - Le 14/04/2020 à 22:16
Merci pour vos mots qui me font toujours autant de bien. Votre pensée qui prend ses racines dans les vôtres est limpide. Humaniste. Généreuse. Merci...
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Isabelle Alonso - Le 15/04/2020 à 14:46
Gracias, amigo...
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